Écritures de l’histoire « Le Travail du récit »

Programme Écritures de l’histoire
« Le Travail du récit » (2020-2025)
Responsable : Corinne Saminadayar-Perrin, professeur de littérature française du XIXe siècle (www.csaminadayar.fr)

Ces dernières années ont été marquées par une intense réflexion sur ce que l’historiographie doit à la littérature : on s’interroge sur les usages que les sciences humaines peuvent faire des textes littéraires[1],  mais aussi sur l’efficacité heuristique des « fictions de méthode[2] » ou de « l’histoire avec des si[3] ». Le récit et la fiction apparaissent comme deux instruments particulièrement pertinents pour penser l’histoire, tout en assumant une fonction essentielle dans la production et la diffusion des représentations. La littérature retrouve le statut de science humaine qui était le sien jusqu’au « grand partage », au début du XXe siècle.

S’inscrivant dans ces récentes avancées de la recherche, qui ont considérablement renouvelé nos problématiques et nos perspectives, le programme « Écritures de l’histoire » a exploré ces potentialités spécifiquement historiographiques du récit de fiction, qu’il s’agisse de penser un événement aussi décisif que la Révolution française[4], de s’interroger sur les écritures alternatives de l’histoire[5], ou de d’analyser la fabrique narrative de l’événement[6]. Les débats lancés à l’occasion de ces différentes rencontres ont trouvé un écho important dans l’actualité sociale que nous vivons : qu’est-ce que l’histoire « vue d’en bas » ? Comment saisir l’infra-histoire des invisibles ? L’élaboration plurielle et anonyme d’un contre-récit historique est-elle possible ?

 

Les prochaines années seront consacrées à creuser et à prolonger les questions soulevées par nos précédents travaux, en se centrant spécifiquement sur le « travail » du récit, à tous les sens du terme. Travail collectif et dialogique, au demeurant, puisque l’intertextualité et la réécriture y jouent un rôle décisif : c’est cette dimension paradoxale que nous étudierons dans le colloque international « L’Histoire feuilletée » que nous organiserons en 2020 en partenariat avec New York University. Ces deux rencontres, prévues à New York en février et à Montpellier en novembre 2020, permettront de lancer les grands axes du débat 2021-2025 : en quoi la scénarisation et la mise en intrigue jouent-elles un rôle décisif dans la fabrique du récit historique ? quelles sont les pouvoirs heuristiques que la fiction possède en propre ? en quoi la question des genres influe-t-elle à tous les niveaux dans l’élaboration du récit historique ?

Parallèlement à ces différents axes de recherche, nous préparons, en partenariat avec le programme « Francophonie et mondialisation des littératures », un colloque intitulé Latinité et francophonie. Il s’agira d’étudier les influences du modèle latin sur la constitution de l’espace francophone à l’époque de la colonisation française du second empire colonial (des années 1830 aux années 1960), au plan politique ainsi qu’aux plans linguistique, éducatif et littéraire, en prenant en considération le point de vue des Français et celui des colonisés « sujets » de l’empire français.

Les résultats que nous espérons dégager, mais aussi les questionnements nouveaux qui viendront à émerger, seront diffusés et valorisés par des publications collectives sur tous supports. Sont ainsi programmés un ouvrage collectif (L’Histoire feuilletée), un numéro spécial de la revue Autour de Vallès en partenariat avec l’UMR IHRIM, un dossier Komodo (consacré à l’œuvre d’Éric Vuillard), ainsi qu’une série de conférences destinées aux jeunes chercheurs, dans le cadre du séminaire d’actualité du RIRRA 21.

 

Chercheurs du RIRRA 21 participant au programme : Sandrine Carvalhosa, Marie-Astrid Charlier, Claire Ducournau, Maxime Del Fiol, Christine Pouzoulet, Florence Thérond, Yoan Vérilhac

Doctorants : Héléna Demirdjian, Violaine François, Julie Moucheron, Betty Zeghdany

 

[1] Judith Lyon-Caen, La Griffe du temps. Ce que l’histoire peut dire de la littérature, Paris, Gallimard, « nfr Essais », 2019.

[2] Ivan Jablonka, L’histoire est une littérature contemporaine. Manifeste pour les sciences sociales, Paris, Seuil, « La Librairie du XXIe siècle », 2014.

[3] Quentin Deluermoz et Pierre Singaravélou, Pour une histoire des possibles. Analyses contrefactuelles et futurs non advenus, Paris, Seuil, « L’Univers historique », 2016.

[4] Jean-Marie Roulin et Corinne Saminadayar-Perrin (dir.), Fictions de la Révolution (1789-1912), Presses universitaires de Rennes, 2018.

[5] Jean-Marie Roulin et Corinne Saminadayar-Perrin (dir.), « Les Ateliers de Clio. Ecritures alternatives de l’histoire (1848-1871) », Autour de Vallès, n° 47, 2017.

[6] Héba Machour et C. Saminadayar-Perrin dir., Faire événement. Littérature, art et culture (XIXe-XXIe siècles), Presses universitaires de Rennes, coll. Plurial, à paraître courant 2019

Dernière mise à jour : 27/01/2021