Slow art, Slow game, le slow en questions

Journées d’étude en ligne

Jeudi 22 avril à 9h00 et vendredi 23 avril à 9h30

 

Organisées par : Valérie Arrault (RIRRA 21)

 

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Tout va toujours plus vite. Le monde du travail comme les technologies, elles-mêmes en renouvellement permanent, l’imposent. Pensons aux expéditeurs de messages électroniques, remerciant pour leur réactivité ceux qui répondent dans l’instant : signe des temps postmodernes, qui évoque la corrélation faite entre rapidité et efficacité. Cette quête de la vitesse et de la performance, cette course en avant pour atteindre des objectifs, est aussi une course contre les autres, épousant ainsi l’esprit du temps libéral qui a pernicieusement installé l’idée que tout un chacun devrait vivre dans un rapport social de concurrence pour pouvoir garder sa place et son statut.

 

L’art n’échappe pas à cette règle des temps modernes et postmodernes. On connaissait déjà la sacralisation de la vitesse par les Futuristes. De 1945 à aujourd’hui, les technologies de l’image, la production exponentielle de l’industrie culturelle et l’enchaînement des événements artistiques sont allés beaucoup plus loin en imposant leur rythme effréné. Et cela vaut dans tous les domaines : des spéculateurs du marché de l’art globalisé jusqu’aux gamers, les protagonistes de la culture contemporaine sont toujours plus avides de nouvelles productions. Le « bougisme » dénoncé par Pierre-André Taguieff, le « culte de l’urgence » diagnostiqué par Nicole Aubert, l’« accélération sociale » analysée par Hartmut Rosa, sont autant de facettes d’un même phénomène qui affecte désormais le champ de la culture et de l’art contemporain.

 

L’accélération de nos vies quotidiennes comme des flux de marchandises et de personnes en vient à présent à essouffler les individus et les sociétés, tout en amenuisant la plupart des ressources naturelles. Dès 1977, décrivant cette logique mortifère dans Vitesse et politique, le philosophe Paul Virilio écrivait : « nous sommes tous les soldats inconnus de la dictature du mouvement ». Il ne tient qu’à nous de déserter, prendre nos distances vis-à-vis de ces mirages que sont la recherche permanente de vitesse et d’efficacité, et imaginer des alternatives contreculturelles, comme celle de faire, produire, vivre autrement que sous le joug des cadences prescrites par l’économie et la technique.

Cette idée, déjà présente chez certains contestataires des années 1970 (« On arrête tout, on réfléchit, et c'est pas triste », proclamait une célèbre BD), a trouvé à la fin des années 1980 une première forme d’application avec le concept de slow food développé par Carlo Petrini en réaction aux fast foods. Elle s’est aujourd’hui épanouie en une philosophie de la lenteur : slow art, slow design, slow fashion puis, un peu plus tard, slow game proposent de nous réapproprier le temps, de retrouver un mode de vie plus serein, c’est-à-dire moins aligné sur le rythme infernal de la machine industrielle.

 

Dans le cadre des recherches du programme « Pratiques plastiques contemporaines et contre-cultures », la journée d’étude Slow art, Slow game, le slow en questions interrogera les procédés et les processus de création de certaines oeuvres ainsi que les théories et les discours médiatiques, affectés par ou opposés à cette philosophie du slow. Le slow serait-il un nouveau label marketing du capitalisme vert, une forme illusoire de réenchantement de nos sociétés ? Ou faut-il voir en lui le compagnon de route idéal de la décroissance, ce mouvement qui prône une sortie de l’industrie et de l’économie pour retrouver un rapport au monde plus équilibré ? La philosophie du slow peut-elle mettre un terme à la confiscation du temps virgilien, celui des rythmes de la nature et des métiers humains ? Autant de pistes non exhaustives qui viendront nourrir une réflexion autant artistique que philosophique.

 

Dernière mise à jour : 11/05/2021