APPEL À COMMUNICATION : La fabrique du détail, à la croisée du cinéma et des arts plastiques

Jusqu'au 1er juin 2024

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La fabrique du détail
À la croisée du cinéma et des arts plastiques

 

Jeudi 17 et vendredi 18 octobre 2024 – université Paul Valéry Montpellier 3
Mercredi 6, jeudi 7 et vendredi 8 novembre 2024 – université Paris 1 Panthéon-Sorbonne

 

Colloque international pluridisciplinaire organisé par
Caroline San Martin (MCF cinéma, université Paris 1 Panthéon-Sorbonne),
Hélène Sirven (MCF esthétique, université Paris 1 Panthéon-Sorbonne),
Jean-Philippe Trias (MCF cinéma, université Paul Valéry Montpellier 3)2

 

Appel à communications

En 1992, Daniel Arasse (1944-2003) publie Le Détail. Pour une histoire rapprochée de la peinture
(Flammarion). Le détail se révèle alors comme un objet d’étude infini. Motif discret ou emblème
sursignifiant, il se singularise dans le rapport qu’il entretient avec l’œuvre. Considéré pour lui-même,
dans un effet de présence voire de jouissance, pointé par la composition du tableau ou isolé par le regard
de celui ou celle qui le voit, indice d’interprétation ou clé de lecture symbolique, trace de migrations des
formes ou empreinte du processus de création, le détail ne cesse d’être interrogé comme signe multiple et
complexe. Tantôt il disloque le parcours réglé du regard, tantôt il révèle la machinerie figurative. Il
apparaît par conséquent pour l’historien de l’art comme un écart ou un lieu de résistance, au point,
parfois, de faire sortir l’œuvre du régime de la représentation, questionnant l’histoire et la théorie des
images.

Le détail est avant tout le lieu d’une expérience où se rejoignent création et réception. Fabriqué autant par
le producteur ou la productrice de l’œuvre – il est redevable de son regard et de son action – que par les
spectatrices et spectateurs – ancrant dans leurs imaginaires des éléments devenus emblèmes des œuvres
quand bien même le souvenir de celles-ci s’estomperait – le détail n’a de cesse de faire vaciller les
catégories établies. Ainsi, fait-il également chavirer les présupposés et invite les chercheurs et
chercheuses à reconsidérer l’analyse et la possibilité même d’une histoire des formes.

Programmé à l’automne 2024, ce colloque pluridisciplinaire à la croisée du cinéma et des arts
plastiques propose de penser le détail comme fabrique, en considérant une triple posture : celle des
artistes (la genèse de l’œuvre peut s’organiser à partir d’un détail, certains détails peuvent avoir été créés
pour ne pas être vus1), celle des spectateurs et spectatrices (les détails sont choisis ou construits par celles
et ceux qui regardent2) et celle des analystes (nombre de méthodes reposent sur l’étude du détail :
herméneutique, iconologie, sémiologie de l’image, micro-histoire, critique génétique, et, pour le cinéma,
analyses textuelle, figurative ou figurale).

Nous souhaitons donc réfléchir à notre tour aux principes méthodologiques que l’étude des détails
convoque et aux questions qu’elle soulève. Comment mobilisons-nous cette notion aujourd’hui ? Quels
sont les enjeux du détail dans les arts de l’image en mouvement et dans leur analyse ? Qu’en est-il de
l’usage du détail dans les pratiques artistiques depuis la modernité ? Bref, comment penser la reprise de
cette notion aujourd’hui dans nos pratiques de création, de réception, de théorisation ?

À travers ces interrogations, nous nous essayons à un triple saut. Le premier est temporel et, par
incidence ici, disciplinaire et médiatique. Les réflexions d’Arasse se focalisent sur des périodes qui
précèdent la modernité, et a fortiori qui concernent des images fixes et la question de l’imitation. Nous
aimerions que ce colloque permette d’expérimenter la notion de « détail » dans des créations plus
contemporaines, inscrites dans une logique temporelle qui distribue d’autres rapports au tout. Le second
saut est transversal. Le livre d’Arasse est ponctué de références à des peintres qui ont commenté leur
propre travail. Nous souhaitons également accorder une place importante à la théorie et à l’histoire faites
par les artistes et les cinéastes, et ainsi reprendre, dans la fabrique du détail, l’importance du dialogue
entre pratique et théorie, création et recherche. Le troisième saut est latéral, puisque nous tenterons de
découvrir, en questionnant le détail au-delà d’Arasse et de l’histoire de l’art, des pratiques autres
capables d’éclairer recherche et création dans les arts de l’image en mouvement, jusqu’au numérique et à
l’IA.

Pour interroger l’actualité d’une telle pensée nous proposons quatre entrées possibles :
   - Le détail comme production. Il s’agit d’interroger la fabrique du détail dans sa matérialité même, dans
le cours de la conception des œuvres, mais aussi dans leurs analyses et leurs réceptions. Que pourrions-
nous dire de ces détails qui déclenchent les imaginaires, que ce soient ceux des artistes au moment de
créer, ou ceux des analystes et du public ?
   - Le détail comme lieu d’interrogation de nos connaissances. Le détail, à travers sa façon de
questionner le voir par la pratique créative ou analytique, n’a de cesse d’interroger notre rapport au
savoir3. Quelles énigmes les détails nous proposent-ils ? Quels apprentissages la sensibilité aux détails
pourrait-elle nous apporter ? Quelles postures de pensée déterminantes les détails nous permettent-ils
d’adopter ? Comment interrogent-ils la pratique et les connaissances de celles ou ceux qui créent ?
   - Le détail comme méthode pour l’analyse des œuvres. Que pouvons-nous dire de ces pratiques et
techniques qui extraient, détourent, ralentissent, accélèrent des éléments du flux continu des œuvres
pour mieux les observer, de plus près, plus longtemps ? Comment rendre compte des œuvres par leurs
détails : comment les raconter, comment les citer ?
   - Le détail comme lieu théorique de dialogue entre le cinéma et les arts plastiques. Quels sont les
chemins de traverse que le détail nous permet d’emprunter ? Ne nous aiderait-il pas, avec ses forces
propres, à échapper à la norme, à ces catégories qui « ont comme l’air d’avoir été faites de loin4» ?
Comment ce changement d’échelle s’incarne-t-il dans nos pratiques de création, de réception et de
théorisation ? Comment mobilisons-nous ce regard posé de près que préconise Daniel Arasse à la suite
de Paul Klee5 ? La dimension politique des œuvres ne résiderait-elle pas aussi finalement dans les
résistances qu’imposent les détails ?

Les propositions de communication (une page, un titre et 300 mots, accompagnés d’une notice
biographique de 150 mots) sont à adresser à caroline.san-martin@univ-paris1.frhelene.sirven@univ-
paris1.fr et jean-philippe.trias@univ-montp3.fr pour le 1 er juin.

 

Comité scientifique
Miguel Almiron, PR arts plastiques, université Paris 1 Panthéon-Sorbonne
Emmanuelle André, PR cinéma, université Paris Cité
Serge Cardinal, PR cinéma, université de Montréal
Claire Chatelet, MCF cinéma, université Paul Valéry Montpellier 3
Térésa Faucon, MCF HDR cinéma, université Sorbonne Nouvelle
Anna Guillo, PR arts plastiques, Aix Marseille université
Jacinto Lageira, PR esthétique, université Paris 1 Panthéon-Sorbonne
Mathias Lavin, PR cinéma, université de Poitiers
Loig Le Bihan, PR cinéma, université Paul Valéry Montpellier 3
José Moure, PR cinéma, université Paris 1 Panthéon-Sorbonne
Thierry Serdane, MCF arts plastiques, université Paul Valéry Montpellier 3
Dick Tomasovic, PR esthétique, université de Liège
Barbara Turquier, responsable de la recherche, Fémis
Gwenola Wagon, PR arts plastiques, université Paris 1 Panthéon-Sorbonne

Bibliographie
André Emmanuelle, Esthétique du motif. Cinéma, musique, peinture, Saint-Denis, Presses universitaires
de Vincennes, coll. « Esthétiques hors cadre », 2007
Amiel Vincent, Esthétique du montage, Paris, Nathan, coll. « Nathan Université », 2001
Amiel Vincent, Moure José, Histoire vagabonde du cinéma, Paris, Vendémiaire, coll. « cinéma et
séries », 2022
Arasse Daniel, Le Détail. Pour une histoire rapprochée de la peinture, Paris, Flammarion, coll. « Idées et
recherches », 1992
Arasse Daniel, « Conversation avec Daniel Arasse », par Stéphane Bou et Jean-Baptiste Thoret,
Simulacres, no 2, 2000 : « Circulations », p. 9-15
Arasse Daniel, Histoires de peintures, [2003], Paris, France Culture / Denoël, 2006, chap. 20 et 21 : « La
Peinture au détail » et « Pour une histoire rapprochée de la peinture »
Arnaud Diane, Changements de têtes : de Georges Méliès à David Lynch, Pertuis, Rouge Profond, coll. «
Raccords », 2012
Arnaud Diane, Glissements progressifs du réel : les faux réveils au cinéma, Aix-en-Provence, Rouge
Profond, coll. « Décors », 2018
Aumont Jacques, L’interprétation des films, Paris, Armand Colin, coll. « Cinéma/arts visuels », 20175
Aumont Jacques, « Détails sur le détail », Comment pensent les films. Apologie du filmique, Milan,
Mimésis, coll. « Images, Médiums », 2021, p. 217-239.
Barthes Roland, « L’effet de réel », Communications, no 11, 1968, p. 84-89
Barthes Roland, La Chambre claire, Paris, Cahiers du cinéma / Gallimard, 1980
Belloï Livio, Hagelstein Maud (dir.), La mécanique du détail. Approches transversales, Paris, ENS
éditions, 2013
Bellour Raymond, L’analyse du film, Paris, Albatros, coll. « Ça cinéma », 1980
Bertrand Romain, Le Détail du monde. L’art perdu de la description de la nature, Paris, Seuil, 2019
Brenez Nicole, De la figure en général et du corps en particulier : l’invention figurative au cinéma,
Bruxelles, De Boeck université, coll. « Arts et cinéma », 1998
Brook Timothy, Le Chapeau de Vermeer. Le XVIIe siècle à l’aube de la mondialisation, trad. Odile
Demange, Paris, Payot, coll. « Histoire », 2010
Caillet Aline, L’Art de l’enquête, savoirs pratiques et sciences sociales, Milan, Mimésis, coll. « Art,
esthétique, philosophie », 2019
De Biasi Pierre-Marc, Anne Herschberg Pierrot (dir.), L’œuvre comme processus, Paris, CNRS éditions,
coll. « Génétique », 2017
Derrida Jacques, La Vérité en peinture, [1978], Paris, Flammarion, coll. « Champs », 1996, p. 44-94
Damisch Hubert, Théorie du nuage, pour une histoire de la peinture, Paris, Seuil, 1972
Descola Philippe, Georges Didi-Huberman, « A quoi servent les images », conversation au Musée du
Quai Branly, 11 janvier 2023. En ligne : Université populaire :
https://www.youtube.com/live/SYSSuoNpoSU
Didi-Huberman Georges, « Question de détail, question de pan », dans Devant l’image. Question posée
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Didi-Huberman Georges, Tables de montage, Saint-Germain-la-Blanche-Herbe, IMEC, coll. « Le lieu de
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Dubois Jacques, « Le détail », dans Les romanciers du réel. De Balzac à Simenon, Paris Seuil, 2000,
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Epstein Jean, « Réalisation de détail » [1922], dans Écrits sur le cinéma, Paris, Seghers, 1974, vol. 1,
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Ferrer Daniel, Logiques du brouillon, Paris, Seuil, coll. « Poétique », 2011
Ginzburg Carlo, « Traces. Racines d’un paradigme indiciaire », trad. Monique Aymard, [1980], dans
Mythes emblèmes traces. Morphologie et histoire, [1989], Lagrasse, Verdier, 2010, p. 218-294
Grendi Edoardo, « Micro-analyse et histoire sociale », Écrire l’histoire, no 3, 2009, p. 67-80
Lageira Jacinto, L’Art comme Histoire. Un entrelacement de poétiques, Milan, Mimésis, coll. « Art,
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Lapoujade David, Les Existences moindres, Paris, Éditions de Minuit, coll. « Paradoxe », 2017
Lavin Mathias, « Détail », dans Emmanuelle André, Jean-Michel Durafour, Luc Vancheri (dir.),
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Le Bihan Loig, « Shining » au miroir : surinterprétations, Aix-en-Provence, Rouge profond, coll.
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Lindeperg Sylvie, Nuit et Brouillard, un film dans l'histoire, Odile Jacob, 2007
Lindeperg Sylvie, Nuremberg, la bataille des images, Payot et Rivages, coll. « Histoire », 2021
Longo Sara, Daniel Arasse et les plaisirs de la peinture, Paris, éditions de la Sorbonne, coll. « Histoire
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Milner Jean-Claude, La puissance du détail : phrases célèbres et fragments en philosophie, Paris,
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Kuntzel Thierry, « Le travail du film 2 », Communications. no 23, 1975, p. 136-153
Menegaldo Gilles (dir.), Le cinéma en détails, Poitiers, La Licorne, 2003
Nicolas, François, Les moments favoris : une problématique de l'écoute musicale, Reims, Noria, 1997
Niney François, Le Subjectif de l’objectif. Nos tournures d’esprit à l’écran, Paris, Klincksieck, 2014
Rancière Jacques, Les voyages de l’art, Paris, Le Seuil, coll. « La librairie du XXIe siècle », 2023
Jacques Revel, « Microstoria », dans Christian Delacroix, François Dosse, Patrick Garcia et Nicolas
Offenstadt (dir.), Historiographies, concepts et débats, Paris, Gallimard, 2010, coll. « Folio histoire », t.
1, p. 529-534
San Martin Caroline, « De quelle adaptation est-il vraiment question dans A History of Violence de David
Cronenberg (2005) ? », TransCreation, no 4, mars 2024
Sirven Hélène, « La méthode Teyssèdre : Arthur Rimbaud et le Foutoir zutique », Nouvelle Revue
d’Esthétique, « Bernard Teyssèdre », Dominique Chateau (dir.), n°32, PUF, 2023/2, p.41-56
Trias Jean-Philippe, « Des brouillons au film, le mouvement de la création : Michael Kohlhaas d’Arnaud
des Pallières. Analyse microgénétique d’une scène », CinétrENS, no 3, « Brouillons », ENS Lyon, 2017,
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Vancheri Luc, Les Pensées figurales de l’image, Paris, Armand Colin, coll. « Cinéma/arts visuels », 2011
Zhong Mengual Estelle, Apprendre à voir : le point de vue du vivant, Arles, Actes Sud, coll. « Mondes
sauvages », 2021
Zabunyan Dork, Jacques Rancière et le monde des images, Milan, Mimésis, coll. « Images, médiums »,
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Dernière mise à jour : 11/04/2024